mercredi 30 septembre 2009

Photos, vidéos et vie privée



J'ai dû "anonymer" mes élèves pour respecter leur vie privée, et c'est normal, mais c'est aussi bien dommage, parce qu'ils sont tous très beaux sur ces photos, où l'expression des visages laisse transparaître leurs joies et leurs enthousiasmes.
Peut-être, un jour, pourrais-je utiliser les photos d'origine, mais la loi est là et le droit à l'image est une donnée trop souvent ignorée : à preuve tous les blogs et sites scolaires non protégés qui fleurissent sur le net. Parfois, je me dis que je suis un peu tatillonne, mais je trouve aussi, en même temps, que ce qui est du domaine privé n'a pas à être exposé sans le consentement de tous les acteurs.

Cette année du Petit Jardin a donc été aussi une année de photos et de mini-vidéos grâce à un appareil photo numérique plutôt basique mais très efficace. Basique, simplement parce que je suis fâchée avec la technologie sophistiquée dont je n'ai guère l'utilité. A quoi bon posséder le nec plus ultra quand il s'agit simplement de faire de l'utilitaire... J'aime les assistances techniques efficaces et rapides à comprendre et à mettre en œuvre. Je ne suis pas une pro de l'image et je me fiche un peu des souvenirs paysagers avec grand angle. Il y a pour cela d'excellents professionnels.

J'aime les gens et les images que je capture sont autant de petits moments de vie.
Cette année-là, lors de la 1ère réunion de parents, j'ai proposé de prendre des photos, beaucoup sans doute (mais moins que je ne l'imaginais), avec leur autorisation écrite. Qu'un seul parent refuse- et c'était son droit- et j'aurais dû éliminer toutes les photos où leur enfant apparaissait. Il n'y a eu aucune hésitation. Toute l'année durant ou presque, mon appareil s'est trouvé à portée de main. Je pensais pouvoir "livrer" ces moments de vie scolaire à la fin de chaque trimestre avec un montage explicatif, mais la mise en œuvre s'est révélée trop lourde. C'est en fin d'année scolaire que j'ai copié sur 25 supports apportés par les parents les 2 GO d'archives de cette 1ère année d'école.

Tout cela a l'air simple et évident, mais se frotter à des supports différents et lancer 25 copies, ça demande du temps, beaucoup, et de la patience, beaucoup aussi, surtout lorsque certains supports font de la résistance (à la gravure ou encore à la lecture). Et je ne parle pas de la collecte des supports auprès des parents, pourtant très impliqués.

Il a fallu aussi que j'accepte de livrer ce témoignage brut de décoffrage : impossible en effet de mêler sur un même support photos, vidéos et textes explicatifs...du moins mon niveau technique ne m'y a pas autorisé. Malgré cet énorme manque, il n'en reste pas moins que ces traces sont autant de petits moments pris sur le vif et qui témoignent de la vie de la classe telle que les parents ne l'imaginent même pas.
J'ai été plutôt frustrée, à cause de mon incapacité à résoudre ces problèmes de montage, dans mon désir de faire passer la capacité d'autonomie des enfants de 3 ans.

Il existe, dans une classe, des moments un peu magiques que j'aurais aimé partager.
J'espère que tous les enseignants réussissent à les percevoir et à les savourer.
Je veux parler de ces instants où l'on peut dire que "ça tourne tout seul".
L'enseignant est un metteur en scène qui organise, qui met en place, qui crée l'environnement propice aux apprentissages et qui introduit à un moment donné un élément nouveau qui va induire, produire des actions en fonction d'un but à atteindre, avec à chaque fois, des imprévus qui surgissent et enrichissent la situation, les apprentissages... et le savoir-faire de l'enseignant (c'est sans doute ce que l'on appelle l'expérience).
Les petits moments magiques sont ces instants où l'évidence s'installe, où d'un coup, la symbiose se fait, où la sérénité et l'harmonie dominent. On pourrait quitter la salle sur la pointe des pieds que personne n'en serait troublé et que chacun continuerait à se concentrer sur sa tâche. Pour moi, ce sont des instants d'intense satisfaction pédagogique : j'ai réussi à mener ma petite bande vers sa propre prise en charge, chacun à sa place dans le groupe et chacun œuvrant pour soi et en symbiose avec les autres, et je deviens spectatrice. Ils n'ont plus besoin de moi. Magique, je vous dis.
Ce sont ces moments que j'aurais aimé expliquer, parce que l'image alors à besoin de prendre son sens avec des mots. Tant pis et dommage... mais il n'y a que moi qui sache que c'est dommage, parce que les parents ne le soupçonnent même pas.

D'aucuns s'étonneront sans doute que je me sois astreinte à ce travail de copiste numérique et que je ne me sois pas contentée, tout simplement, de mettre en ligne les images, ce qui m'aurait permis, sans doute, d'y ajouter des commentaires...
La mise en ligne ne peut absolument être sûre et contrôlée. Même si les supports DVD et clé USB peuvent servir de base à une diffusion, celle-ci reste cependant restreinte et circonscrite, normalement, au cercle intime. Il n'en est évidemment pas de même avec une ouverture sur le net, même avec mot de passe confidentiel. Il est évident que certains parents transmettront quelques photos aux papys et mamies, mais cette diffusion n'a rien à voir avec une mise en ligne pure et simple qui s'offre à la vue de tout le monde et donc de n'importe qui.
Et non, je ne suis pas paranoïaque juste respectueuse de la vie privée et des ces instants d'intimé fugace captés par mon appareil photo.
Petite réflexion d'observatrice assumée : un petit enfant se laisse observer sans gêne parce qu'il n'a pas intégré encore les codes de comportement et de protection de sa propre personne. On ne pourrait pas surprendre aussi facilement une personne plus grande. D'ailleurs, en grandissant, on sait sentir peser un regard même quand on a le dos tourné.
Ce petit enfant qui se livre, qui laisse capter son image sans artifice, a droit au respect et à la protection des "devenus grands".

Épilogue : le disque dur de mon ordinateur a rendu l'âme avant que j'ai sauvegardé mes archives sur un disque externe... et j'ai dû demander à des parents de me faire une copie de leur copie!

1 commentaire:

  1. Un petit coucou en cette fin de week-end. Je vois que tu as encore bien travaillé!! Je n'ai pas encore pris le temps de te lire en entier. Pour ce qui est du respect de la vie privée...cela s'impose naturellement pour moi. Nous sommes là pour protéger les enfants ( enseignant ou non) et il y a des précautions à prendre. Ce n'est pas parce que les parents nous autorisent à prendre des photos de leurs enfants qu'il faut en permettre l'accès à tous. Nous nous servons de ce support pour travailler et les photos doivent rester la propriété de ceux qui sont dessus. Le fait de masquer leur visage permet de rendre anonymes ces enfants tout en laissant la situation de travail explicite.
    Je ne laisserai pas mes photos de vacances en accès libre; il en est de même pour ce qui se passe à l'école.
    Les photos permettent aussi aux parents d'avoir une vision différente de ce qui se passe en classe; elles doivent, à mon avis, rester accessible aux premiers concernés et à personne d'autre.
    Je vais me presser de lire ce que tu as mis d'autre ces jours-ci.

    RépondreSupprimer